Les évolutions de l’action publique, les attentes fortes des usagers (dématérialisation, accueil et accompagnement du public en présentiel et à distance, open data etc.) renforcées pendant la crise sanitaire, ont incité l’Etat à mobiliser 1,7 milliards d’euros pour soutenir la transformation numérique de l’Etat et des collectivités territoriales dans le cadre du plan de relance.

L’enjeu des compétences numériques des agents territoriaux a été mesuré : 25% d’entre eux n’ont pas une pratique autonome des compétences numériques basiques, telles que l’usage de courriels, d’outils collaboratifs, des fonctionnalités basiques de gestion des fichiers, tandis que leurs métiers évoluent par nature vers davantage de médiation, d’accompagnement des usagers, et l’utilisation d’outils numériques et utilisant des données[1].

Ces constats révèlent une marge de progrès encore importante, mais dans les communes, les conseils départementaux et régionaux, les initiatives dédiées à l’autonomie numérique des agents (évaluation, formation, médiation) sont en plein essor.

L’impact du numérique sur les métiers des agents, une préoccupation récente pour les collectivités et qui s’accélère avec le développement du télétravail et de la dématérialisation.

Si l’informatisation du secteur public local a commencé il y plus de 20 ans, la prise de conscience de son impact sur les compétences à maîtriser est beaucoup plus récente.

Le CNFPT a mené une étude relative à l’impact du numérique sur les métiers de la fonction publique territoriale sur plus d’un an auprès de 300 acteurs dont 159 collectivités[2]. Les travaux ont mis en évidence un besoin urgent de développer l’acquisition de compétences socles liées aux usages du numérique.

Toutefois, la numérisation des métiers des collectivités implique également des montées en compétences plus spécifiques. 42 métiers vont nécessiter à court terme une montée en compétences : communication, finances, planification mais aussi les métiers d’accueil et de médiation (services sociaux, voirie, culture, agents d’accueil…) sont particulièrement exposés à la dématérialisation des outils et des procédures.

Pour le CNFPT, les collectivités sont entrées dans "une nouvelle phase de la transition numérique" liés :

  • à l’intégration des nouvelles technologies,
  • aux obligations réglementaires de dématérialisation, open data…,
  • au niveau des pratiques numériques des habitants,
  • aux nouveaux modes d’organisation et de travail induits ou favorisés par le numérique comme le télétravail, recours au distanciel, travail en réseau et en mode collaboratif.

L’ensemble des 241 métiers territoriaux sont impactés "dès maintenant" par la transition numérique selon leur analyse.

Passer d’une logique « outil » à une logique « compétences » dans les démarches d’accompagnement

La logique de formations bureautique, outil par outil, a montré ses limites face à la diversité d’outils à manipuler et leur constante évolution. L’approche alternative consiste à cibler l’acquisition compétences permettant d’être autonome dans des situations quotidiennes ou nouvelles, de manière à pouvoir s’adapter aux changements ou à l’arrivée de nouveaux outils, et chercher des réponses par soi-même.

L’Union Européenne a développé un cadre de référence de compétences numériques regroupées dans 5 grands domaines[3]. Ce cadre de référence est un point de départ. Chaque catégorie se décline ensuite en compétences simples (saisir du texte dans un logiciel d’édition) jusqu’à des compétences plus complexes (coder une page web en html).

Dans une démarche d’accompagnement, tout l’enjeu est donc d’identifier celles qui sont pertinentes pour un métier donné, et le niveau de maîtrise attendu.  

Un socle de compétences numériques commun à tous les agents, et des compétences spécifiques complémentaires selon les métiers

La Banque des Territoires et son partenaire Pix ont mené des travaux pour identifier les compétences les plus importantes pour les métiers de la fonction publique territoriale. Pix est une startup d’Etat qui s’appuie sur le cadre de référence européen pour proposer un service en ligne permettant de mesurer, développer et certifier ses compétences numériques aujourd’hui utilisé par plus de 7 millions d’utilisateurs.

A ce jour, plusieurs dizaines de collectivité ont déjà mis en œuvre des stratégies d’accompagnement pour :

  • Cartographier les compétences numériques maîtrisées ;
  • Mettre en place d’un plan de formation adapté aux besoins des agents ;
  • Suivre dans la durée de l’acquisition des compétences.

Ces retours d’expériences ont fait apparaître l'intérêt de construire un référentiel de compétences dédié aux collectivités territoriales. Les travaux de la Banque des Territoires et Pix ont permis d’identifier deux groupes de compétences :

  • un socle de compétences pour l’ensemble des agents (figure 2)
  • et des référentiels orientés métiers (figure 3).

Des parcours d’évaluation de ces compétences ont été conçus dans le cadre du partenariat de la Banque des Territoires et Pix. Ils seront expérimentés par une trentaine de collectivités de février à avril 2022. Suite à l’expérimentation, ces parcours seront intégrés à l’offre de Pix dédiée aux collectivités[4].

Conclusion : Vers une approche intégrée de la transition numérique

L’évolution vers la numérisation de plus en plus de procédures, de services aux usagers et des outils métiers est inéluctable et rend la prise en compte des compétences numériques incontournables.

Toutefois, toute démarche d’accompagnement des compétences doit également tenir compte de l’environnement numérique dans laquelle elle se situe :

  • La connectivité du territoire, notamment dans les zones rurales et en Outre-Mer, pour lesquels la Banque des Territoires est engagée à offrir des solutions de financement aux collectivités et acteurs privés[5].
  • La disponibilité des données à jour et de services performants : du pilotage stratégique du territoires aux interventions des services techniques, la capacité à accéder à des données à jour et à des outils permettant de les exploiter devient un enjeu de souveraineté pour les collectivités[6].
  • L’accès à du matériel adapté : avec la numérisation des activités professionnelles, le besoin de matériel adapté (webcam, micro, tablette, smartphone,…) est exprimé par les agents et particulièrement pour les professionnels de la médiation numérique.

 

NB : Les images de cet article peuvent être diffusées et reproduites sous réserve de la mention de leurs auteurs. 

 

[1] Enquête Pix-Interconnectés-Syntec 2021

[2] Etude « LES IMPACTS DE LA TRANSITION NUMÉRIQUE SUR LES MÉTIERS TERRITORIAUX », CNFPT, novembre 2021

[3] 1) Maîtrise de l'information et des données (ex : localiser et récupérer des données, des informations et des contenus numériques, juger de la pertinence de la source et de son contenu)

2) Communication et collaboration (ex : interagir, communiquer et collaborer, gérer son identité et sa réputation numériques)

3) Création de contenu numérique (ex : créer et éditer des contenus numériques)

4) Sécurité (ex : protéger les appareils, les contenus, les données personnelles et la vie privée dans les environnements numériques, être conscient de l'impact environnemental des technologies numériques et de leur utilisation)

5) Résolution de problèmes (ex : identifier les besoins et les problèmes, et résoudre les situations problématiques dans les environnements numériques)

Voir : https://ec.europa.eu/jrc/en/digcomp/digital-competence-framework (site en anglais)

[4] Pix propose une offre à destination des organisations professionnelles pour leur permettre d’accompagner la montée en compétences de leurs publics. L’offre Pix Territoires aura vocation à proposer :

  • des parcours sur étagère disponibles sans surcoût pour les collectivités pour faciliter l’orientation à terme vers des formations adaptées aux besoins précis des agents 
  • des scénarios de déploiements transverses et orientés par grand corps de métiers pour accélérer la mise en place d’un projet de développement des compétences numériques des agents

Pour en savoir plus : https://pro.pix.fr/collectivites/

[6] La Banque des Territoires met à disposition des ressources pour guider les stratégies des décideurs et investit dans des sociétés offrant des services répondant aux exigences de l’administration locale : https://www.banquedesterritoires.fr/smart-city-gerer-les-donnees-de-mon-territo…