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Alors que la crise sanitaire a révélé les liens entre « santé des écosystèmes », « santé humaine » et « santé économique » et que les plans de relance post COVID-19 s’élaborent, de nombreuses voix de tous horizons (experts, entreprises, responsables politiques, syndicats, ONG) se sont élevées pour réclamer une relance verte, axée sur les thématiques de la transition écologique.
Parmi celles-ci figurent les propositions des ONG et syndicats (Shift Project, CFDT, …) ainsi que des think tanks (« Plan de relance climat » d’I4CE). Du côté des entreprises, on peut retenir la tribune de 100 dirigeants de grandes entreprises françaises signée par le directeur général Eric Lombard, publiée dans Le Monde, pour faire de la relance économique un accélérateur de la transition écologique et soutenir le « Pacte vert » européen visant la neutralité carbone d’ici 2050. On peut aussi citer l’Alliance pour une relance verte, à l’initiative de l’eurodéputé Pascal Canfin, signée par 180 ministres, des députés européens, des ONG, des syndicats et des dirigeants d’entreprises qui s’engagent à soutenir les plans de relance fondés sur la transformation et qui placent la lutte contre le changement climatique et la perte de biodiversité au centre de la politique économique européenne.
Les travaux du Haut Conseil pour le Climat ainsi que les propositions des 150 citoyens tirés au sort qui constituent la Convention Citoyenne pour le climat alimentent également ces débats sur ce qui pourrait constituer « une relance verte ».
Voici une synthèse de ces propositions.
Le secteur du bâtiment contribue pour 18% aux émissions de gaz à effet de serre de la France.
Dans le cadre de son plan de relance, le Gouvernement prépare des mesures sur la rénovation thermique des bâtiments qui devraient être annoncées mi-juillet.
Au niveau européen, le « Pacte vert » de la Commission européenne propose une vague de rénovations des logements sociaux, des écoles et des hôpitaux.
A l’échelle de la société civile, les propositions des experts du Haut Conseil pour le Climat, de l’Institut de l’Economie pour le Climat (I4CE), du Shift Project, de la Convention citoyenne pour le climat et de la CFDT font consensus et appellent à un plan national de rénovation énergétique des logements en suivant la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) qui recommande la rénovation de 500 000 logements par an pour atteindre l’objectif de neutralité carbone.
I4CE insiste sur la nécessité de la rénovation globale en proposant un financement par l’éco-prêt à taux zéro et un allongement de la durée de remboursement de celui-ci. Il rappelle aussi que selon l’Etude « Marchés et Emplois » de l’ADEME, la rénovation énergétique dans le bâtiment résidentiel représente plus de 200 000 emplois.
Les transports sont responsables de 29% des émissions de gaz à effet de serre de la France.
Le plan de soutien national au secteur de l’automobile et de la filière aéronautique prévoit notamment des fonds destinés à la modernisation et à la transformation écologique de ces filières ainsi qu’une intensification du soutien aux efforts de R&D pour faire de la France l’un des pays les plus avancés dans les technologies vertes.
A l’échelle européenne, le « Pacte vert » propose la suppression des subventions pour les combustibles fossiles. Il prévoit aussi d’étendre le système d’échange des quotas d’émission au secteur maritime, de mettre en place une tarification routière efficace dans l’Union Européenne et de réduire les quotas gratuits pour les compagnies aériennes.
Au niveau international, l’Agence Internationale de l’Energie appelle les Etats à mettre au cœur des plans de relance post COVID-19 pour un monde décarboné, le soutien aux énergies renouvelables et alerte sur le risque d’abandon de projets visant à se passer d’énergies fossiles face au coût faible du pétrole. Le rapport du réseau REN21 rappelle que pour la 5ème année consécutive, la capacité de production des énergies renouvelables dépasse celle issue des combustibles fossiles et nucléaires et qu’il est temps de prendre le virage d’une économie décarbonée en supprimant notamment les subventions aux combustibles et en mettant en place un prix du carbone.
Le secteur de la mobilité est aussi au cœur des plans de relance de la société civile. Pour I4CE, il faut renforcer les aides à l’acquisition de voitures bas-carbone et augmenter le malus à l’encontre des voitures les plus émettrices. L’institut propose aussi de réglementer la publicité des constructeurs automobiles, de restreindre la circulation des véhicules les plus polluants et de doter les collectivités de moyens financiers pour la construction d’infrastructures cyclables.
Le Shift Project souhaite un report modal de la voiture et de l’aérien vers le train ainsi que la création de voies de covoiturage. Le Réseau Action Climat (RAC) propose de supprimer l’ensemble des connexions aériennes, qui s’effectuent en moins de 5h en train, aux compagnies opérant sur le sol national, de taxer le kérosène et d’augmenter l’écocontribution sur les billets.
Enfin, la Convention citoyenne pour le climat propose la mise en place d’une taxe aux frontières pour les entreprises de transport et la réduction de la TVA sur les billets de train.
Le lien entre climat et biodiversité a été rappelé à maintes reprises par les scientifiques (notamment l’IPBES, équivalent du « GIEC » pour la biodiversité).
Le 4 juillet 2018, le gouvernement dévoilait son Plan biodiversité dans lequel l’Etat se mobilise avec les collectivités, les ONG, les acteurs socio-économique et les citoyens pour un objectif commun : la préservation de la biodiversité.
Au niveau européen, on trouve dans les propositions du « Pacte vert » pour pérenniser la biodiversité européenne, la mise en place de zones protégées représentant 30% des terres et 30% des mers. De plus, pour restaurer les écosystèmes terrestres et marins dégradés, la Commission européenne souhaite étendre l’agriculture biologique, réduire de 50% d’ici 2030 l’utilisation de pesticides et planter 3 milliards d’arbres.
A l’échelle de la société civile, les experts du Haut Conseil pour le Climat rappellent que les sols contiennent trois fois plus de carbone que l’atmosphère et les écosystèmes terrestres et côtiers français absorbent annuellement 1/5 des émissions. La préservation des écosystèmes français est donc non seulement essentielle en tant que telle, mais elle contribue également à compenser nos émissions de gaz à effet de serre. Le Haut Conseil pour le Climat souligne également les synergies entre climat, environnement et santé et notamment la nécessité de lutter contre la déforestation pour des raisons climatiques, de préservation de la biodiversité et sanitaires.
Le Shift Project, quant à lui, souligne la nécessité de faire de « l’agroécologie » la norme en matière d’agriculture. Par ailleurs, les ONG, comme les citoyens de la Convention citoyenne pour le climat, proposent la mise en place d’objectifs stricts en matière de lutte contre l’artificialisation des sols avec la mise en place d’un moratoire sur les nouvelles zones commerciales implantées à la périphérie des villes pour réduire l’artificialisation des sols. La Convention propose de « définir une enveloppe restrictive du nombre d'hectares maximum pouvant être artificialisés réduisant par 2 l’artificialisation des sols ».
La question sociale est aussi au cœur des plans de relance verte. Tous soulignent la nécessité de prendre en compte les impacts sociaux des mesures environnementales afin que celles-ci puissent être mises en œuvre.
A l’échelle de la société civile, le Haut Conseil pour le Climat prône ainsi le renforcement des politiques publiques, notamment de protection sociale et de solidarité contre les grands risques (chômage, maladie, vieillesse).
De même, la CFDT souhaite une relance verte et sociale. Elle propose la revalorisation des métiers à forte valeur ajoutée sociale, revenir au système d’ouverture des droits dès 4 mois travaillés pour l’assurance chômage et au calcul de son indemnité sur les seuls jours travaillés.
Le MEDEF souhaite aussi rediscuter les règles de l’assurance chômage dans un périmètre plus large c’est-à-dire en l’englobant dans l’ensemble des mesures pour l’emploi : chômage partiel, dispositifs alternatifs au chômage partiel dans l’industrie et d’autres secteurs. Par ailleurs, l’organisation patronale souhaite aussi mettre en place une subvention pour l’emploi des jeunes à hauteur de 10 000 € pour les entreprises par apprenti engagé ainsi que l’exonération de charges pendant les 12 mois du premier CDI et propose un crédit impôt transition écologique (sur le modèle du CIR) pour la recherche et un PGE vert. De plus, dans l’optique de relancer la consommation des ménages, le MEDEF est favorable à un éco-chèque sous forme d’un bon d’achat financé par l’Etat et qui serait distribué aux ménages modestes pour les pousser à consommer des produits respectueux de l’environnement.
L’exécutif, dans le cadre de sa réponse à la Convention citoyenne pour le climat, a déjà indiqué vouloir transmettre certaines de ces propositions au Parlement et présentera à la mi-juillet des premiers éléments sur le plan de relance verte.