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Dossier
Leur rôle est crucial dans la société mais ils sont peu identifiés et donc, peu soutenus. Aider un proche vulnérable impacte le quotidien et, souvent, la carrière. Comment le monde du travail doit-il évoluer pour que chacun y trouve sa place ?
Les aidants familiaux ont des visages multiples. Être parents d’un enfant en situation de handicap, accompagner ses parents âgés ou son conjoint malade : autant de situations qui entraînent des besoins différents.
Qu’il s’agisse d’apporter des soins personnels, de réaliser des démarches administratives ou d’accompagner moralement et médicalement un parent malade, leur appui est indispensable au quotidien des aidés. L’aidance prend différentes formes, principalement le soutien moral, les activités domestiques et l’aide aux déplacements.
On dénombre entre 9 et 11 M d’aidants en France (source Drees 2021)
La journaliste Nathalie Lévy raconte son parcours d'aidante dans "Courage au coeur et sac au dos" (ed. du Rocher)
Le cas particulier des jeunes aidants : 1 million de jeunes de 18 à 24 ans aident un proche, notamment financièrement. Ces jeunes ont du mal à en parler car ils ne rentrent pas dans le cadre du proche aidant « classique », souvent âgé de plus de 50 ans. Écoutez le témoignage d'Alice, jeune aidante
Les aidants doivent concilier le temps et l’énergie accordées à leurs proches avec une vie professionnelle et familiale déjà bien remplie. Près de
6 millions d’aidants sont salariés. (source Drees 2021)
Un salarié proche aidant est une personne qui exerce une activité salariée et qui « vient en aide, de manière régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne d’une personne en perte d’autonomie, du fait de l’âge, de la maladie ou d’un handicap. » (Article 51 de la loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement.)
L’aidance concerne toute la société, c’est un sujet important pour les branches professionnelles, les partenaires sociaux et les acteurs de la protection sociale, car tous les aspects de l’activité peuvent être impactés : organisation, efficacité, quantité, qualité du travail, etc.
Accompagner les collaborateurs aidants, cela ne s’invente pas. Il faut des outils, des formations et une sensibilisation adaptée.
Morgane Hiron
déléguée générale du Collectif Je t’Aide.
Crédit © Ambres Fernandes Cruz / Hanna Syvak / Adobe Stock
sources : Etude Ocirp / Viavoice 2024, baromètre Tilia 2023 « Aider et travailler », baromètre Ipsos/Macif 2020)
Le coût de l’aidance pour les entreprises du secteur privé est estimé entre 24 et 31 Md€ par an, sans compter la baisse de performance liée à la fatigue des salariés actifs non identifiés (étude OCIRP / Viavoice 2023).
Les aidants s’épuisent en général plus rapidement que les personnes dont ils s’occupent. Il est souvent difficile d’équilibrer vie personnelle et vie professionnelle sans craquer… L’employeur doit donc mettre en place des dispositifs pour donner les moyens à ses salariés de concilier plus facilement parcours professionnel et responsabilités personnelles (voir le guide « Aidants en entreprise », de la CNP). Cette charge mentale élevée peut aussi avoir un impact sur le lien social et le répit.
Crédit © Ambres Fernandes Cruz / Hanna Syvak / Adobe Stock
source : Ipsos/Macif 2020
Les principaux besoins généralement cités par les aidants sont : des moyens financiers, des congés intermittents pour gérer un imprévu et des aménagements horaires. Regroupées entre elles, l’ensemble des solutions liées à la gestion du temps arrivent en tête des besoins.
L’aidance en entreprise requiert plusieurs adaptations, la principale étant d’aider les salariés à identifier leur situation d’aidant. Cela nécessite de bien les connaître et de leur fournir, le cas échéant, un statut particulier. La parole est en effet le premier pas pour faire connaître, adapter et coconstruire les réponses à l’aidance, tant avec les salariés qu’avec leurs encadrants.
Crédit © Sabrina DOLIDZE / Divergence
En complément, des processus RH adaptés peuvent être développés en fonction de la singularité de chaque situation. Afin d’alléger la charge des aidants, un aménagement du temps de travail peut même être envisagé. Le salarié peut également bénéficier du « congé de proche aidant. » Toutes ces mesures ne peuvent pas être prises seules et nécessitent une vraie culture d’accompagnement au sein des entreprises. La sensibilisation des managers constitue une étape essentielle pour apporter un soutien réel aux salariés aidants, notamment pour éviter que l’aidant se sente stigmatisé comme un salarié « faible » ou improductif. Les entreprises sont encouragées à mieux soutenir leurs salariés aidants à travers des actions de formation, de sensibilisation et d’adaptation du temps de travail au titre de la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE). Des formations ou conférences visant à sensibiliser les autres collaborateurs à la situation sont autant de solutions pour faire sortir l’aidant de l’isolement potentiel dans lequel il peut se trouver.
La mobilisation de tous les acteurs de l’entreprise constitue un levier essentiel pour la bonne gestion de l’aidance, afin de faire du lieu de travail à la fois un lieu de performance économique et un lieu d’accompagnement.
La mission confiée par le gouvernement à France Stratégies en 2022 a débouché sur la formulation de 24 recommandations à destination de l’État, des entreprises, des partenaires sociaux et des fédérations professionnelles, ainsi que le déploiement du label Cap’Handéo. Ce label, initié par KLESIA et Handéo et déployé en partenariat avec l’Agirc-Arrco, apporte aux entreprises un accompagnement concret et innovant. Il a pour but d’outiller les entreprises, petites ou grandes, pour les aider à reconnaître et soutenir les salariés en situation d’aide à un proche vulnérable afin de mieux prendre en compte leurs besoins et attentes. Cette démarche s'inscrit dans un cadre plus large, au regard des enjeux d'attractivité, de fidélisation des salariés et de performance globale des organisations.
Selon les projections de l’Insee, le nombre de personnes âgées dépendantes va augmenter rapidement et pendant longtemps dans notre pays. La pyramide des âges s’inverse lentement mais sûrement. Il y a désormais plus de personnes âgées que de jeunes de moins de 20 ans (voir les Projections de population à l’horizon 2070). Le nombre d’aidants va donc inévitablement croître dans les années à venir. Le besoin de se prémunir contre les difficultés liées à la perte d’autonomie est grand, notamment avec le départ en retraite de la (nombreuse !) génération des « baby boomers ».
Crédit ©Ambre Fernandes Cruz / Hanna Syvak / Adobe Stock
Sources : Insee, Fondation Vaincre Alzheimer, OCIRP 2024
En arrière-fond, il y a ce qu’on peut appeler un déni démographique : on est un pays vieillissant, qui fait moins de bébés. Il faut prendre conscience de ce mouvement qui affecte tout le monde. Les entreprises sont désormais confrontées directement aux conséquences de ce retournement démographique. Les RH ont du mal à recruter, mais ce n’est pas parce que les jeunes ne veulent pas travailler, comme on l’entend parfois ! C’est simplement qu’il y en a relativement moins… On va avoir davantage besoin de bras dans les métiers de services à la personne, or, c’est un secteur déjà en tension.
Maxime Sbaihi
directeur stratégique du Club Landoy et expert des questions économiques et de démographie
Ce choc démographique va profondément transformer nos sociétés et, par extension, nos organisations professionnelles. Ce constat met en évidence le défi économique et social de l’aidance que les entreprises ne peuvent plus ignorer. Des solutions concrètes doivent être proposées pour faire changer le regard sur une situation qui va tous et toutes nous concerner un jour ou l’autre. A ce moment-là, nous serons soulagés de savoir que des solutions existent ! C’est la meilleure option pour préparer au mieux dès aujourd’hui la société de demain.
L’aidance est le miroir de la dépendance en entreprise. Parce qu’elles en subissent les conséquences (absentéisme, fatigue, etc.), les entreprises commencent à en prendre conscience même si elles ne font pas encore toujours le lien avec le vieillissement inédit de la population. C’est un nouveau sujet RH à prendre en compte qui exige un management plus fin.
Maxime Sbaihi
Si l’on ajoute à cela le manque de moyens inhérent à notre système de santé, les proches aidants sont inexorablement appelés à jouer un rôle de pivot dont ils n’ont pas totalement conscience, et pour lequel ils sont souvent trop peu préparés. Ce grand bouleversement à venir implique de redéfinir les trajectoires professionnelles et les besoins des entreprises en fonction des attentes nouvelles des collaborateurs. Au-delà du bien-être au travail et de la qualité de vie, il s’agit de repenser la valeur travail face à l’allongement de la durée de vie.
On a mis en place une ronde d'aidantes avec ma mère et ma tante.
Plusieurs axes peuvent être développés pour agir efficacement en faveur des salariés aidants : sensibilisation, accompagnement (administratif, psychologique, sanitaire et financier) et, par-dessus tout, le maître-mot : la flexibilité ! D’où l’importance pour les organisations d’identifier des solutions structurelles efficaces pour accompagner ces salariés au profil particulier.
Soit l’entreprise donne de la flexibilité à ses collaborateurs aidants et prend en compte leur situation, soit elle ne fait rien et il y aura nécessairement des impacts sur la performance.
Laurence Hulin
directrice diversité, inclusion et égalité des chances du groupe La Poste
Il est naturel d’aider un proche en difficulté, c’est pourquoi une majorité n’a pas conscience d’être aidant. Identifier les aidants constitue donc la première étape pour l’employeur. Selon le service social de la Caisse des Dépôts : « Le plus dur est de leur faire prendre conscience qu’ils sont dans la situation d’un aidant. La plupart d’entre eux nous répondent ‘c’est mon rôle de fils/ fille que de m’occuper de mes parents !’ ». Si beaucoup n’en parlent pas, c’est qu’ils ont souvent le sentiment que leur situation relève de la vie privée et craignent qu’elle provoque des freins dans leur carrière. Pourtant, les aidants ayant informé leur hiérarchie se montrent en général plus à l’aise et sont plus nombreux à trouver que leur hiérarchie les accompagne mieux.
Parmi les coûts directs pour l’employeur, le premier est d’éviter l’absentéisme. Les aidants sont logiquement plus souvent en arrêt de travail que la moyenne des actifs (en moyenne 16 jours d’arrêt en plus, selon un sondage Malakoff Humanis). Grâce aux mesures mises en place au sein de l’établissement public de la Caisse des Dépôts depuis 2020, les salariés aidants accompagnés sont moins en arrêt maladie qu’avant.
Parmi les coûts indirects, l’employeur doit être capable d’anticiper le manque éventuel de productivité dû à la fatigue et au stress induits. Par exemple, en accompagnant la mobilité géographique du salarié pour faciliter le rapprochement avec son proche vulnérable.
200km séparent en moyenne l’aidant de son aidé.
Les déplacements induits par la situation peuvent contribuer à la fatigue et au manque de disponibilité du salarié. Viennent ensuite les conséquences possibles impactant les équipes au global, que ce soit en termes de charge de travail ou d’organisation, difficilement chiffrables mais bien réels.
Pris dans l’engrenage du quotidien, les aidants ne savent pas forcément quelle aide chercher ni où la trouver. « Aider les aidants » : c'était l'une des promesses du candidat Macron à l’élection présidentielle en 2022. Si des dispositifs d’aide nationaux existent, ils ne semblent pas à la hauteur des enjeux et des besoins pour couvrir toutes les situations… Depuis, le Gouvernement a défini une nouvelle stratégie nationale pour les aidants pour la période 2023-2027. Cette stratégie prévoit entre autres d’améliorer le congé proche aidant (CPA) et l’allocation journalière proche aidant (AJPA).
Soit parce qu’ils ne connaissent par leur existence, soit par fatigue administrative, une majorité d’aidants ne demande pas d’allocation pour le proche aidé, et ne fait pas appel aux services sociaux. Par exemple, seuls 38% des aidants souscrivent à des services d’aides ménagères pour la personne aidée. (Source : Baromètre Club Landoy / Ifop 2020)
Encore faut-il réussir à s’y retrouver ! La plateforme numérique Mon Parcours Handicap a été développée par la Caisse des Dépôts pour le compte de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Cette plateforme publique, nationale et 100 % accessible accompagne les parcours de vie des personnes en situation de handicap et ceux de leurs proches. Cet outil du quotidien, coconstruit avec une communauté d’usagers, fournit des informations précises et des repères clairs pour favoriser l’orientation et les démarches. Des millions de personnes de tous âges confrontées au handicap, à la maladie, à l'invalidité ou à la perte d'autonomie peuvent continuer à vivre chez elles grâce à la solidarité nationale, aux professionnelles des services et surtout aux aidants familiaux, amis, voisins ou membres de la famille. La rubrique « aidant » de Mon Parcours Handicap récapitule par exemple les principaux droits des aidants et les aides auxquelles ils peuvent prétendre.
Crédit © Ministère des solidarités
La stratégie de la CNSA est d’enrichir la plateforme Mon Parcours Handicap de nouveaux services avec l’appui technique et l’expertise de la Caisse des Dépôts, en lien avec les acteurs de l’écosystème. Les deux organismes sont ainsi entrés au capital de la SCIC Ma boussole aidants en avril 2022 et en ont intégré la gouvernance. La plateforme a initialement été créé par le régime de retraite complémentaire Agirc-Arrco. Grâce à un partenariat, les deux portails d’informations et de services que sont Mon Parcours Handicap et Ma Boussole aidants peuvent croiser leurs bases de données pour offrir à leurs usagers un meilleur accès à une information personnalisée et de proximité. La cartographie de l’offre de proximité qui en résulte bénéficie du soutien des collectivités territoriales et propose une vision fine des solutions liées à la perte d’autonomie sur un territoire donné. Cette plateforme révèle un écosystème large autour du handicap, du grand âge et de la santé permettant d’identifier les offres et de mieux les organiser.
Crédit © Maskot / Adobe Stock
Ma boussole aidants, qui oriente les aidants vers des solutions et des ressources de proximité, compte à ce jour plus de 500 000 utilisateurs.
Syndicats et patronat peinent pourtant à trouver des solutions. Selon l’OCIRP, bien que la négociation collective soit perçue comme un outil efficace, peu d'accords ont encore été signés sur la question des aidants en entreprise. Pour essayer d’accélérer les choses, le Club Landoy, lieu de réflexion sur le vieillissement de la société (Groupe Bayard) financé par la Caisse des Dépôts, a lancé fin 2024 la « Coalition des entreprises engagées » pour faire face au défi que représente l’aidance dans le monde du travail. Le Guide 1 coalition, 20 solutions qu’il a édité propose des solutions concrètes destinées à répondre à ses principaux enjeux. Il répertorie les meilleures pratiques et innovations sociales imaginées par des entreprises, associations ou institutions en soutien à leurs collaborateurs aidants. L’objectif est d’accompagner ces salariés tout en préservant la performance des organisations.
Dans un rôle bien différent de celui de l’État, il est essentiel que les entreprises s’engagent, elles ont tout à y gagner. Elles doivent accepter que cette vulnérabilité entre aussi dans leur quotidien.
Astrid Panosyan-Bouvet
ministre chargée du Travail et de l’Emploi (11/02/2025)
La loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement de 2015 a reconnu le statut de « proche aidant » et l’a étendu à l’entourage (ami, voisin). Ce statut ouvre des droits à des aides financières qui varient en fonction de l’âge et de la situation familiale et sociale du proche aidé, mais aussi de la situation personnelle de l’aidant. Cette reconnaissance s’accompagne d’un « droit au répit », c’est-à-dire la possibilité « de prendre un temps de repos en finançant l’accueil de la personne aidée dans une structure adaptée à ses besoins », selon le Guide du proche aidant
Mon Parcours Handicap liste les aménagements prévus au titre du droit au répit pour les aidants familiaux comme les maisons et séjours de répit.
Consulter les plateformes d’accompagnement et de répit
La Banque des Territoires participe au financement du parcours résidentiel des populations vulnérables, contribuant ainsi à soulager le quotidien des aidants. Elle soutient entre autres des solutions prolongeant le maintien à domicile, comme l’habitat inclusif. Dans le cadre de son offre médico-sociale, elle peut délivrer des prêts bénéficiant à des structures d’accueil temporaire des personnes âgées ou en situation de handicap. Ces projets doivent être portés par des structures publiques ou privées non lucratives. Dans ce cas, le prêt PHARE (taux Livret A +0,6% , en index révisable ou à taux fixe) peut courir jusqu’à 40 ans sur le bâti et jusqu’à 50 ans sur le foncier.
Preuve que les choses bougent, la Banque des Territoires a engagé cette année une opération de maison de répit à Boulogne-Billancourt, dont la livraison est prévue en septembre 2026. Le financement de la Banque des Territoires s’élève à 3,4 M€ en prêt PHARE sur les 10,6 M€ que coûte le projet. Cette solution alternative d’accueil des aidants est portée par la Fondation France Répit. L’objectif est de créer une maison de répit par région.
Du répit bienvenu à la Maison Athéol
À Lamballe (22), Terres d’Armor Habitat finance la réhabilitation et l'extension d'une maison d'accueil temporaire hébergeant des adultes ou des enfants en situation de handicap. Les travaux ont bénéficié d’un prêt dédié aux projets d’habitat destinés à des populations vulnérables de la Banque des Territoires, sous la forme d’un prêt PHARE de 1,24 M€ sur 25 ans. Ce type de structure offre un temps de répit essentiel aux aidants.
Le groupe La Poste, une entité de la Caisse des Dépôts, propose traditionnellement des offres de maintien à domicile, comme la télésurveillance et Veiller sur mes parents , qui permettent d’alléger un peu le quotidien des aidants. Territoires & Autonomie, filiale nationale de La Poste dédiée aux services à la personne, teste en Mayenne un nouveau service, Partage & Convivialité, qui comporte un volet « répit des aidants » important. Le principe est le suivant : pendant que le postier intervient au domicile, l’aidant familial peut aller faire des courses, voir des amis, prendre soin de lui, ou tout simplement prendre l’air. Lors de ces « heures de convivialité », les postiers mandatés proposent des activités favorables au bien-être psychologique et mental des personnes âgées, offrant ainsi à l’aidant un relai provisoire.
Pour le Groupe, ce type d’initiatives contribue à faire connaître et à rendre attractifs les métiers du grand âge tout en préparant la reconversion éventuelle des postiers. Une formule gagnant-gagnant !
Crédit © Groupe La Poste
Les employeurs du groupe Caisse des Dépôts se mobilisent pour mieux répondre aux besoins de leurs salariés aidants et apporter des solutions qui s’adaptent aux différentes situations, susceptibles d’évoluer dans le temps.
Le service social du Groupe propose ainsi un accompagnement personnalisé construit par des assistantes sociales en fonction de la situation personnelle du salarié (familiale, professionnelle, voire financière). Un bon diagnostic de la situation, la mesure des impacts et la définition d’indicateurs concrets et adaptés s’imposent au cas par cas. Aller plus loin nécessite une transformation culturelle profonde.
Crédit © Marie Bucelle
La mise en place de conditions de travail favorisant l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle constitue une des composantes fondamentales de la politique des ressources humaines de la Caisse des Dépôts. Pour cela, un accord sur la qualité de vie et les conditions au travail a été signé fin 2024.
Convaincue que cette thématique concerne tout autant les femmes que les hommes, elle développe des dispositifs visant à accompagner les personnels dans leurs différents temps de vie et promeut leur utilisation. Dans un contexte marqué par des évolutions sociétales fortes comme la demande de temps pour soi, la part croissante de familles monoparentales et des aidants, la Caisse des Dépôts souhaite prendre des mesures spécifiques pour accompagner ses collaborateurs concernés par ces situations qui ont des répercussions sur la vie au travail.
Avenant 1 à l’accord QVCT 2024 de la Caisse des Dépôts
Des mesures concrètes ont été mises en place pour répondre au plus près au besoin du salarié aidant, telle que l’adaptation du temps de travail sur du court terme (1 à 3 mois), davantage de télétravail, bénéficier de don de jours de congés, une autorisation d’absence exceptionnelle jusqu’à 6 jours par an, etc. En cas de congé de solidarité familiale (lorsque l’aidé est en fin de vie ou que le pronostic vital est engagé), la CDC maintient la rémunération de l’employé pendant un mois. Grâce aux mesures mises en place au sein de l’Etablissement public de la Caisse des Dépôts depuis 2020, les salariés aidants accompagnés sont moins en arrêt maladie qu’avant.
Au niveau national, les agents publics aidants peuvent, depuis fin 2023, prendre leur congé proche aidant de manière fractionnée, par exemple une demi-journée pour accompagner leur proche (et non plus une journée complète par obligation). L’aménagement du temps de travail allant de pair avec une charge de travail réduite, ces congés sont transformables en période d’activité à temps partiel.
Parmi les actions jugées les plus efficaces, les groupes d’échanges entre pairs-aidants permettent de faire prendre conscience que la situation d’aidant est partagée par d’autres. depuis juin 2022, la Caisse des Dépôts organise des ateliers des aidants coanimés par une assistante de service social et une psychologue du travail. Ces temps d’échange privilégiés permettent aux collaborateurs aidants d’échanger sur leur quotidien, de partager leurs conseils et bonnes pratiques, et de se sentir soutenus à travers le tissage d’un lien social. Ces ateliers sont ouverts aux collaborateurs quelle que soit leur porte d’entrée (service social, médecine du travail, etc.).
9 ateliers des aidants ont été organisés
pour les salariés de l’Etablissement public de la Caisse des Dépôts en 2024.
L'établissement public de la Caisse des Dépôts va mettre en place dès 2025 un certificat d'aidant pour les salariés qui en font la demande. Il sera la porte d’entrée pour faciliter la mise en œuvre de mesures déjà en place, telles que l’aménagement de temps de travail, le télétravail élargi, le don de jours, etc. Les nouvelles mesures contenues dans l’accord QVT, soit 2 jours d’absence ASA, et augmentation du plafond CESU pris en charge par l’employeur, accompagnent le dispositif.
Ce certificat légitime le rôle d’aidant en lui donnant de la visibilité et un statut. C’est un outil gagnant-gagnant pour le collaborateur et l’entreprise, qui peut ainsi s’organiser en fonction de la situation précise de son employé.
En règle générale, la labellisation « salarié aidant » dans les entreprises contribue au développement d’une culture, d’un écosystème d’entreprise favorable à la conciliation vie personnelle/vie professionnelle. Elle est jugée efficace par 66 % des salariés aidants et les 3/4 des managers et DRH. (OCIRP/ Viavoice 2024)
L’aidant a en lui des capacités et une force insoupçonnées dont il peut être fier, et qu’il peut mettre à profit au sein de son organisation. Charge à cette dernière de lui faire toute la place, de lui faire confiance et de croire en lui.
Aude Marot
collaboratrice Caisse des Dépôts aidante
En partant du constat que la moitié de ses collaborateurs a plus de 50 ans, La Poste tente d'anticiper le vieillissement des postiers (et des Français en général !) pour préparer au mieux la transition démographique en cours. Le Groupe a mis très tôt en place un management bienveillant vis-à-vis des actifs aidants.
En interne, un guichet des aidants recueille aujourd’hui 14 000 appels par an, contre 900 appels à sa mise en place en 2016, preuve du besoin croissant de réponses !
Elle a par exemple mis en place depuis 2017 un « certificat d’aidant » renouvelable tous les ans. Il permet de bénéficier des mesures RH spécifiques notamment l’aménagement des horaires de travail, la possibilité de télétravail supplémentaire, le passage à temps partiel, la mobilité géographique pour se rapprocher de son aidé, 3 jours de congé supplémentaires pour accompagner son aidé à ses rendez-vous médicaux ou administratifs, jusqu’à 90 jours de solidarité par an payés à 100% par La Poste.
5000 postiers bénéficient
d'un certificat d'aidant en 2025.
Outre la préservation du bien-être de ses salariés, La Poste crédibilise ainsi son statut d’entreprise à mission. En novembre 2024, l’agence Moody’s a salué l’engagement RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) du groupe La Poste avec la note de 81/100, le classant à la 1re place, tous secteurs confondus. L’agence récompense les efforts d’un Groupe qui allie performance économique et engagement sociétal de manière exemplaire.
Parfois, il peut être douloureux pour un agent de concilier son rôle d’aidant et son activité professionnelle, notamment lorsque son environnement de travail n’est pas propice. La charge de travail est conséquente et s’alourdit avec l’enfermement. Être identifié comme aidant par un certificat donnera de la légitimité au rôle d’aidant dans le monde de l’entreprise car il sera incontestable. Par ailleurs, cette reconnaissance fera du bien au moral des personnes concernées car elles auront officiellement un statut qui les protégera.
Aude Marot
1/4 des personnes âgées de plus de 60 ans sont aidantes (source Drees, février 2023)
L’aidance ne s’arrête pas à la retraite, au contraire ! La Caisse des Dépôts est gestionnaire du fonds d’action sociale de deux organismes de retraite : la Caisse Nationale de Retraites des Agents des Collectivités Locales (CNRACL) et l’Ircantec (caisse de retraite des agents contractuels de droit public). Les actions mises en place bénéficient aux pensionnaires de ces deux régimes, aussi bien en tant qu’aidants qu’en tant qu’aidés. Via leurs dispositifs d’action sociale, ces caisses de retraites montrent une volonté d’accompagner les retraités à chaque moment de la vie.
L’objectif commun est clair : que les retraités vivent mieux chez eux, le plus longtemps possible. Cette aide peut prendre la forme d’un accès aux services à la personne, et même d’un soutien financier pour le paiement des factures de gaz et d’électricité pour les retraités ayant le plus faible niveau de ressources, mais pas uniquement.
Les deux régimes de retraite proposent également des aides pour adapter le logement afin d’anticiper la perte d’autonomie du proche âgé ou de rendre l’habitat accessible aux personnes en situation de handicap. Ils peuvent également mettre à disposition des aides exceptionnelles pour l’achat d’un véhicule adapté ou d’une prothèse.
Parmi les aides individuelles qu’elle propose, l’action sociale du régime de l’Ircantec peut par exemple attribuer -sous conditions- une aide financière au retraité ayant cotisé à ce régime de retraite aidant un conjoint ou un concubin fragilisé ou une aide à un retraité aidé par un proche. Cette aide va dans les deux sens car on peut être aussi bien aidant qu'aidé en fonction des périodes de la vie. Elle peut concerner les frais d’hébergement temporaire en établissement, les frais d’accueil de jour, les frais de garde effectuée à domicile par des intervenants professionnels, ainsi que les frais des séjours ou de vacances dans des structures adaptées. Les critères de responsabilité sociétale et environnementale sont au cœur de la démarche des investissements financiers de l’Ircantec.
Le fonds social des régimes de retraite gérés par la CDC co-finance également certaines des actions de l’association France Alzheimer et maladies apparentées, qui agit depuis bientôt 40 ans auprès des personnes malades et de leurs aidants. Via une subvention de 20 000€ par an, la CNRACL soutient par exemple depuis 2018 le financement des séjours vacances organisés par l’association. Chaque année, ces séjours encadrés par des bénévoles formés permettent à des aidants et des personnes malades de se ressourcer dans un cadre agréable et de profiter d’une parenthèse dans leur quotidien avec la maladie.
Ce soutien essentiel a notamment permis à
21bénéficiaires de la CNRACL de partir en séjours vacances en 2024.
Parmi ses actions collectives, l’Ircantec soutient des dispositifs qui peuvent bénéficier aux retraités des deux régimes (et aux autres !). Le régime retraite des agents contractuels de droit public co-finance à hauteur de 100 000€ par an les actions d’accompagnement à destination des aidants familiaux, tels que la formation des aidants, des cafés mémoire, des groupes de parole, une halte-relais, des ateliers de relaxation, etc. La CNRACL subventionne également ces « ateliers du bien vieillir » dans 18 structures territoriales à hauteur d’environ 1,1M€ par an.
Afin d’agrémenter son panel d’offres au profit de ses cotisants, la CNRACL a récemment signé une convention de partenariat avec France Parkinson. Cette maladie, qui concernait 175 000 personnes en France en 2020, risque de toucher de plus en plus de Français avec le vieillissement de la population.
Selon Santé publique France, le nombre de malades devrait augmenter de
56% en 2030 par rapport à 2015.
Le partenariat donne accès aux retraités de la CNRACL à un numéro d’aide ainsi qu’à des ateliers sportifs, à des groupes de parole et à de l’information. La subvention s’élève à 20 000€ par an renouvelable chaque année.
Ces aides de natures différentes traduisent une volonté forte de ces deux régimes de retraite de reconnaître, d’encourager et de soutenir les aidants dans leur mission difficile, quel que soit leur âge.
Cette période peut être l’occasion de valoriser des compétences précieuses. De l’écoute à la résilience, en passant par la résistance au stress et les capacités organisationnelles, les collaborateurs affirment en général avoir acquis de nouvelles compétences de par leur situation d’aidant. Les organisations gagneraient à réfléchir aux possibilités de valoriser les compétences acquises au cours de cette période qui peut parfois durer une bonne partie de la vie professionnelle. Une meilleure organisation et une meilleure gestion du stress peuvent ainsi par exemple devenir des accélérateurs de productivité, à condition que l’entreprise propose de bonnes conditions de travail.
En 2021, le Cercle Vulnérabilités et société, AG2R La Mondiale et l’Association française des aidants ont initié une démarche inédite d’identification des compétences induites par l’aide à un proche malade, en situation de handicap ou de dépendance, ainsi que de son potentiel de valorisation sur le marché du travail. Leurs conclusions laissent apparaître que les situations d’aidance renforcent et/ou génèrent des compétences considérées comme d’avenir par les recruteurs. Quatre grands blocs de compétences en ressortent : la capacité de s’organiser, celle de travailler avec les autres et d’orienter, de résoudre des problèmes complexes, et enfin, celle de maîtriser des équipements et des technologies.
L’aidance est un véritable sujet sociétal, économique et humain, et semble enfin mieux appréhendé par le monde du travail. Les entreprises et organisations commencent à comprendre que sa prise en compte relève d’une démarche citoyenne et socialement responsable. En tant que telle, elle est presque devenue une fonction à part entière, dont la société a définitivement besoin. Face à une transition démographique d’ampleur, nous sommes collectivement appelés à repenser nos organisations.
Participer au débat a le mérite de contribuer à poser les jalons d’une mobilisation d’envergure afin d’ancrer le salarié aidant au cœur du monde du travail, public comme privé. L’aidance est un défi, mais doit aussi être vue comme une opportunité pour les entreprises de repenser leur organisation de manière plus humaine et performante. La parole autour de l’aidance doit être libérée afin d’aider à ce que cet enjeu devienne pleinement intégré aux politiques RH et sociales des entreprises et organisations.
La mise en place de solutions concrètes et duplicables constitue un levier stratégique pour améliorer la qualité de vie au travail, réduire l’absentéisme et favoriser l’engagement des salariés. La responsabilité doit être partagée entre entreprises, salariés, partenaires sociaux et dirigeants. Chacun joue un rôle actif dans l’accompagnement de la transformation des organisations. Le monde du travail a tout à gagner à gérer correctement dès aujourd’hui les situations d’aidance !
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