Face à la montée des tensions géopolitiques mondiales, le réarmement s’impose comme un moteur économique d’ampleur pour les années à venir. Le livre blanc publié en juillet 2025 par Bureau T, la cellule stratégie et prospective du groupe SCET, et intitulé Les dividendes du réarmement – Quel impact de la hausse des dépenses de défense sur les économies territoriales ? revient sur les conséquences depuis l’invasion de l’Ukraine en 2022. En effet, les pays de l’OTAN se sont engagés dans un mouvement de réarmement rapide, à la fois pour soutenir l’effort de guerre ukrainien et pour répondre à leurs propres besoins stratégiques.

Une opportunité de 30 à 45 Md€ par an pour l’industrie française d’ici 2035

30 à 45 milliards d’euros par an : c’est, selon les projections du groupe SCET, l’opportunité de gain de marché annuelle pour la base industrielle et technologique de défense (BITD) française d’ici 2035. Cependant, la France n’est pas encore prête à saisir cette opportunité. Si elle est le deuxième exportateur mondial d’armement, ses capacités productives sont déjà sous tension : 91 % de taux d’utilisation pour ses industriels de défense, des difficultés de recrutement croissantes, une formation en difficulté et un tissu d’entreprises souvent fragile financièrement.

Pour réussir, l’effort de défense doit s’ancrer dans les territoires. L’enjeu est donc de mieux répartir les investissements, implanter des sites de production sur l’ensemble du territoire, favoriser l’innovation duale (civile/militaire) et renforcer les synergies entre entreprises, collectivités, centres de formation et acteurs publics, afin de développer et maintenir sa place forte au sein d’un écosystème en plein essor. En effet, ce potentiel de croissance pourrait avoir de fortes répercussions sur le territoire, il pourrait générer jusqu’à 800 000 emplois, directs et indirects.

Vers une territorialisation du réarmement productif

Certaines régions sont des places historiques de l’industrie de l’armement – Occitanie, Bretagne, Provence Alpes Côte d’Azur, Île-de-France – quand d’autres doivent encore développer leur potentiel. Le rapport appelle à structurer des « clusters de défense » territorialisés, à renforcer l’accompagnement des PME, et à réorienter les outils publics de financement (Bpifrance, Caisse des Dépôts, Régions…) vers les secteurs les plus prometteurs.

Une nouvelle phase s’ouvre : celle de la territorialisation du réarmement productif. Pour réussir cette réindustrialisation.

5 leviers structurants sont à actionner par la puissance publique :

  • Un programme national dédié aux territoires industriels de défense, inspiré du dispositif « Territoires d’industrie » lancé en 2018, qui permettrait d’accélérer l’émergence de projets industriels dans les zones jugées prioritaires.
  • Le soutien ciblé à des clusters locaux prêts à se mobiliser, qui passerait par l’identification et l’accompagnement des territoires où les conditions sont réunies : écoles formant aux métiers industriels stratégiques, foncier disponible, capacités d’innovation, et mise en réseau entre PME, laboratoires, collectivités et ministère des Armées.
  • Une mobilisation renforcée des dispositifs publics de financement, notamment Bpifrance, peut jouer un rôle d’accélérateur en accompagnant les entreprises souhaitant entrer dans la BITD ou y monter en puissance. Plus largement, la puissance publique peut intervenir pour consolider le secteur, en appuyant la montée en taille critique de certains acteurs-clés, dans un écosystème où la logique concurrentielle diffère des autres filières.
  • Les activités liées à la défense représentent en moyenne 20 % du chiffre d’affaires de nombreuses PME industrielles. Pour encourager leur montée en puissance, il est essentiel de leur offrir un accompagnement spécifique, les aidant à se diversifier progressivement grâce aux outils de financement existants.
  • La relocalisation des productions stratégiques à fort volume – comme les munitions – doivent faire l’objet d’une relocalisation industrielle en France. Cela implique un engagement politique fort, adossé à des contrats d’achat pluriannuels, pour sécuriser les investissements.

Si l’Europe est légèrement en retrait, avec seulement quatre groupes de défense parmi les 20 plus grands à l’échelle mondiale. L’opportunité est de structurer, en partant de la France, une base industrielle européenne capable de rivaliser, en construisant des chaînes de valeur intégrées, compétitives et innovantes à l’échelle européenne. Cela passera par des alliances verticales, une mutualisation des capacités et l’émergence de véritables champions technologiques continentaux.

Pour aller plus loin : 

 Télécharger le livre blanc publié en juillet 2025 par Bureau T, la cellule stratégie et     prospective du groupe SCET :  Les dividendes du réarmement – Quel impact de la  hausse des dépenses de défense sur les économies territoriales ?