Dans les années 80, plusieurs études convergeaient déjà sur l’origine anthropique des changement climatiques et sur la probabilité d’un lien de cause à effet entre l’usage des énergies fossiles et le réchauffement de notre planète. Aujourd’hui chacun s’accorde sur l’urgence d’une réponse énergétique cohérente pour préserver le climat, consensus qui s’est traduit par l’accord historique, à l’issue de la COP28 en décembre 2023, en faveur d’une transition « hors » des énergies fossiles. Les questions qui se posent désormais sont celles des moyens et des trajectoires pour y parvenir.

Faire des énergies décarbonées la clé de notre ambition climatique

Pour espérer rester alignés sur une trajectoire de réchauffement à +1,5°C ou +2°C et atteindre la neutralité carbone en 2050, les défis à relever sont nombreux : redéfinir notre système énergétique, sécuriser notre approvisionnement en énergie, réduire notre dépendance vis-à-vis des importations extérieures, préserver notre compétitivité, et enfin, protéger les consommateurs français.

Si jusqu’ici nous avons poursuivi et même intensifié, l’usage du charbon et du pétrole au nom de la préservation de notre confort et du maintien de notre prospérité, une nouvelle opportunité se présente à nous pour changer de trajectoire, même si les décisions restent encore fébriles au gré des rencontres intergouvernementales pour l’énergie et le climat.

La France tente d’agir et d’enclencher une transition énergétique fondamentale. Depuis le début du siècle, avec les lois Grenelle et plus récemment la loi Climat Résilience, le législateur impose un cadre de plus en plus exigeant pour consommer et produire mieux. La crise énergétique de 2023 a renforcé la nécessité d’un changement radical par le besoin d’une plus forte souveraineté nationale. Aussi, au sein du Programme Pluriannuel de l’Energie en consultation publique en décembre dernier, les deux versants d’une décarbonation ambitieuse sont exposés : d’un côté le maintien d’une production d’électricité par le nucléaire, fleuron de l’industrie française, de l’autre le développement accéléré des énergies renouvelables.

Une juxtaposition nécessaire qui n’est pas sans raviver le débat opposant les pro-nucléaires aux défenseurs des EnR mais qui conforte l’idée que le vrai combat demeure dans la juste accélération du développement d’énergie décarbonée au service des territoires.

Définir des zones d’accélération pour le développement d’énergies locales

Concrètement, à travers la loi d’Accélération des Energies Renouvelable de mars 2023, le débat énergétique est porté au plus près des concitoyens. Ainsi les communes doivent définir des zones d’accélération pour le développement d’énergies locales et ce, en lien étroit avec les intercommunalités, toujours en charge de la politique territoriale par leur plan climat-air-énergie territorial (PCAET). C’est en apportant aux élus les clés de lecture des potentiels de leur territoire que la mise en perspective du récit local peut introduire la juste place de l’énergie et ainsi permettre l’établissement de ces zones prioritaires.

Boileau disait « Avant donc que d’écrire, apprenez à penser […] Hâtez-vous lentement ».Et bien, nous pourrions reprendre à propos de l’énergie « Avant donc que de produire, apprenez à consommer […] Hâtez-vous lentement ».

C’est un message qui doit être porté au cœur des territoires au travers des outils de planification tel quel les PLU qui porteront bientôt la traduction concrète des zones d’accélération. L’enjeu est de ne pas perdre de vue l’importance de rationnaliser nos consommations pour ne pas produire à outrance.

 

Une stratégie nationale à adapter aux réalités locales

L'application de la stratégie nationale sur les EnR au niveau local n'est pas sans difficultés pour les élus. Les consultants en énergie et en urbanisme peuvent témoigner de la complexité parfois de poser ce type de priorité impopulaire.

Les élus se heurtent tout d'abord aux différences des contextes locaux. Chaque commune, chaque région possède ses propres caractéristiques environnementales, économiques et sociales, qui nécessitent des adaptations spécifiques des lois. Ce qui fonctionne dans une métropole peut ne pas être valable en zone rurale. Ces défis se complexifient par la nécessité d'une coordination efficace entre les différents niveaux, ainsi que la mobilisation des parties prenantes locales, incluant les entreprises et les citoyens, dont l'engagement est crucial pour le succès de ces initiatives.

Il est nécessaire d’approfondir la compréhension des dynamiques communales et intercommunales. Accompagner des intercommunalités telle que Grand Paris Sud Seine Essonne Sénart illustre bien le sujet et les défis. Dans ce cas précis, ces défis s’apparentent souvent à une équation complexe nécessitant une approche stratégique pluridimensionnelle. C’est en multipliant les temps de concertation et d’écoutes des acteurs que l’on contribue à conduire le changement. L’animation du bloc communal a, en particulier, amené à bâtir un observatoire Air Climat Energie au sein de l’intercommunalité qui a été décliné pour chaque commune. Les indicateurs sont partagés aux différents échelons et la responsabilité de chacun est explicité et mesuré.

L’objectif étant de diriger le changement de manière inclusive, en travaillant avec et pour les territoires, à chaque échelle.