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En France, en 2018 le secteur du numérique représentait 43 366 établissements et 775 577 salariés, dont 58% dans l’informatique. D’ici à 2022, ce sont 190 000 emplois qui seraient à pourvoir dans les nouvelles technologies de l’information et du numérique.

Le secteur du numérique constitue donc un véritable vivier d’emploi, avec en tête des métiers comme développeur web, développeur mobile ou encore chef de projet digital. L’accès à ces métiers et aux formations qui y préparent est pourtant très hétérogène en fonction des profils : aujourd’hui le secteur compte 70% d’hommes, vivant ou travaillant en Ile de France et les plus de 40 ans y sont sous-représentés. Comment, dans ce contexte, faire du numérique un levier d’inclusion sociale ? C’est ce que propose Simplon.co depuis 2013.

 

Numérique et diversité : facteur d’exclusion ou d’inclusion ?

On compte aujourd’hui 13 millions de personnes « éloignées du numérique », dont 6,7 millions qui ne se connectent jamais à Internet. Si la crise liée à la Covid 19 a mis en évidence et accru l’omniprésence du numérique et de ses outils au quotidien, celle-ci a également mis en exergue l’accès inégal aux ressources et compétences qui y sont liées.

Ce phénomène de « fracture numérique » revêt plusieurs dimensions. La première, matérielle où la fracture numérique renvoie à un déficit en termes de moyens, d'équipements et d'accès. La seconde, intellectuelle et sociale, souligne les disparités de type sociocognitif, telles que le manque de maîtrise des compétences et de connaissances fondamentales pour l'usage du numérique et l'exploitation de ses contenus ainsi que le manque de ressources sociales pour développer des usages qui permettent de négocier une position sociale valorisante au sein des univers sociaux fréquentés.

La fracture territoriale participe également à renforcer la fracture numérique, lorsqu’elle n’en est pas la cause directe.  Comme le rappelait récemment le CNNUM dans son Avis pour un « numérique accélérateur de diversité », les actions de médiation sont souvent absentes des territoires les plus éloignés, tels que les zones rurales et les Quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Or, sans compétences minimales, le numérique devient un véritable facteur d’exclusion.

En 2019, selon l’INSEE, 38% des usagers manquent d’au moins une compétence numérique de base et l’illectronisme concerne 17% de la population. L’étude alertait également sur les  inégalités liées aux  compétences,: ainsi "toutes choses égales par ailleurs, les usagers d’Internet des communes rurales manquent davantage de compétences de base en recherche d’information (+44%) ou en communication (+72%) – à l’instar de ceux des unités urbaines de 100.000 à 1.999.999 habitants (+59%) – que ceux de l’agglomération parisienne, tandis que ceux des DOM manquent davantage de compétences en communication (+99%) et résolution de problème (+82%) que ceux de métropole ».

 

Simplon : faire du numérique un levier d’inclusion sociale

A l’origine de Simplon.co se trouve l’ambition de former le plus grand nombre au digital et à ses métiers. Depuis sa création Simplon.co a formé gratuitement plus de 7 800 personnes dont 35% de femmes et 61% de personnes peu ou pas diplômées. Premier réseau français de formations gratuites labellisées par l‘État Grande École du Numérique, Simplon compte 102 Fabriques dont 89 France, qui accueillent une ou plusieurs formations, parfois un Fablab et/ou des activités de production. L’ancrage territorial de ces Fabriques est une des clés pour l’atteinte des citoyens les plus éloignés de la formation.

 

L’inclusion est dans l’ADN du projet Simplon, à commencer par ses publics : les formations s’adressent de manière prioritaire à des talents qui sont éloignés de l’emploi et/ou sous-représentés dans le numérique (jeunes de moins de 25 ans ayant quitté le système scolaire, personnes peu ou pas diplômées, personnes issues de territoires ou de milieux fragiles, demandeurs d’emplois ou allocataires du RSA, seniors, personnes réfugiées ou primo-arrivantes, en situation de handicap). Sans aucun pré-requis technique, les formations Simplon sont accessibles sur critères sociaux et avec un objectif de parité hommes-femmes à 2021.

Indépendamment des critères de sélection, l’inclusion est également au cœur des parcours pédagogiques : en permettant aux réfugié.es et ressortissant.es non-européen.nes d’associer des cours de français intensif aux formations techniques, ou encore en pensant un environnement de travail accessible à tous. Afin de faciliter l’accès au numérique dès le plus jeune âge, Simplon organise par ailleurs des ateliers d’initiation au code à destination des enfants et des jeunes les plus éloignés du numérique. Ces ateliers sont animés par des apprenants de Simplon.

Ces différentes initiatives, au-delà d’une simple politique de sélection à l’entrée, ont en commun l’adaptation des parcours en fonction des spécificités de chaque public. Cette adaptation permet aux apprenants, une fois la première étape de sélection franchie, de suivre les formations jusqu’à leur terme. Le taux de sortie positive avoisine d’ailleurs les 70%.

 

Agréée ESUS (Entreprise solidaire d’utilité sociale), Simplon respecte des engagements forts en termes de lucrativité limitée, de gouvernance participative et d’écarts de salaires et soutient les associations, les porteurs de projets solidaires ou les ONG à se développer et à se digitaliser.

 

FOCUS : Les femmes et le numérique

En 2017, selon MENESR – SIES, on comptait seulement 27% de femmes dans les écoles d’informatique en France, elles étaient 33% à occuper des postes dans ce secteur en 2019 et le chiffre baisse à 15% pour les métiers techniques du secteur numérique. Ces chiffres s’expliquent en grande partie par l’image du numérique : souffrant des stéréotypes associant le codage à des compétences masculines. Les formations et par conséquent les métiers du numérique peinent donc à attirer les femmes qui ne se reconnaissent pas dans cette vision. Mais le manque de diversité, en particulier le manque de femmes, dans les équipes développant des technologies a également un impact sur l'innovation et peut entraîner l’échec de certains produits et services.

D’après une étude de la commission européenne datant de 2018, au regard de la place croissante des volumes importants de données et des algorithmes dans la vie quotidienne, l’absence de diversité n’est pas sans conséquences sur la reproduction des inégalités. La technologie reflète les valeurs de ses développeurs, et celle de l'information sur laquelle elle se base, les algorithmes ne sont donc jamais neutres et incorporent essentiellement des partis pris. La diversité est donc nécessaire pour identifier les biais et les prévenir, dans le cas inverse les technologies seraient vectrices d’inégalités.

Dans l’optique de dégenrer la tech, Simplon cible prioritairement les femmes et propose un programme qui leur est réservé. La formation « Hackeuses - Culture et techniques du numérique » est ouverte à toutes les femmes, dès 18 ans et cible prioritairement les femmes venant des Quartiers prioritaires de la Politique de la Ville, sans emploi et/ou sans formation, en reconversion professionnelle ainsi que les profils internationaux.

Cette formation qui se déroule sur 6 semaine, est gratuite, certifiante et reconnue par l’état. Elle a pour ambition de renforcer l’accès des femmes aux formations et aux emplois numériques. Enfin, parce que la déconstruction des schémas de genre se fait dès le plus jeune âge, Simplon lutte contre l’enracinement de ces stéréotypes lors de ces ateliers destinés aux enfants et aux jeunes.

 

 

Après un premier investissement en 2017 à hauteur de 750 K€, la Banque des Territoires a renouvelé son accompagnement à hauteur de 1,5M€ en 2019 à l’occasion de la dernière levée de fonds (12M€). Ce soutien renouvelé témoigne de l’engagement à long terme de la Banque des territoires auprès des acteurs de l’Économie sociale et solidaire et de sa contribution à l’adaptation et au développement des compétences pour des territoires plus attractifs et inclusifs.

L'auteur

Roxane Pauty est diplômée de l’Université Paris Dauphine après un double cursus avec l’ENA en finances publiques. Elle rejoint la Banque des Territoires en 2017 après une expérience  au sein de l'Ecole Française de Rome. Au sein de la direction de la cohésion sociale et territoriale elle est chargée d’investissement et des partenariats sur la thématique formation et enseignement supérieur.